‘Cannibales et Pollens’ de Mahi Binebine à la lumière de la théorie postcoloniale

Abstract

Dans une interview faite à l'auteur sur Cannibales, Binebine dit qu'il n'a rien inventé dans cette histoire. C'est l'histoire d'une arche de Noé moderne racontant la nuit du départ d'un groupe qui attend le moment propice pour traverser le détroit de Gibraltar afin d'atteindre clandestinement l'Espagne, d'où quelques-uns vont monter vers Paris. Il nous présente avec les histoires tragiques de chaque personnage, des histoires qui les poussent vers cette tentative dangereuse. Il transforme un fait divers devenu désormais banal du drame de l'immigration clandestine en une parabole de l'immigration. ‘Pollens’ est un roman qui peut paraître banal à la première lecture, une histoire d'amour finie pour jamais. Mais à l'instar de l'histoire amoureuse entre Pierre et Sonia, Binebine présente la vie pénible des villageois à Kétama face à « cette administration toute puissante qui quadrille le territoire. » C'est une ville dominée par une sorte de dictateur, le Seigneur Moussa, qui vit dans l'opulence de son palais tandis que les habitants se trouvent démunis de tout confort. Le Seigneur Moussa est un riche vendeur de drogue qui enchante Sonia. Désormais, Pierre se bat contre le maghzen (l’administration corrompue du Seigneur), mais sa lutte éperdue le conduit « au bout d'une désespérance et d'un délire devenus destin. » « Je ne suis pas fou, simplement impuissant [ ... ] comme la plupart des gens qui vivent dans ce pays. » Nous examinerons ses œuvres contemporaines à la lumière de la théorie postcoloniale afin de les étudier sous un aspect qui met en exergue les relations qu'entretiennent les pays ex-colonises avec leur ex-colonie.